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20/10/2010

Allez les jeunes!




Dans « la Provence » du samedi 16 octobre, Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille, donnait son opinion sur les conflits sociaux actuels. Interrogé à  propos de l’engagement des lycéens aux côtés des manifestants, voici quelle fut sa réponse : « Les jeunes doivent d’abord et avant tout penser à leurs études. Les retraites, c’est à nous d’y penser. »
On imagine aisément le ton péremptoire avec lequel il a dû lâcher cette réponse au journaliste qui l’interviewait. Elle reflète assez parfaitement la conception fermée du pouvoir  propre aux caciques de la Droite. Que le peuple se contente de travailler, qu’il laisse à ceux qui « savent » - ses élus – le soin de gouverner  et tout ira bien dans notre beau pays. Pas de vision plus cloisonnée et plus hiérarchique de la politique. Par sa bouche, c’est la « France d’en haut » - chère à Raffarin – qui décrète. L’ennui pour ces gens-là, c’est que de moins en moins de Français acceptent cette forme de ségrégation. Ils ne supportent plus la suffisance de nos actuels dirigeants ; ils ne croient plus en leur prétendue sagesse quand elle rogne sans cesse leur pouvoir d’achat et qu’elle détricote insidieusement des droits qu’ils pensaient acquis. La réforme du régime des retraites aura été la goutte d’eau faisant déborder le vase de leur amertume. Et quoi de plus compréhensible que, dans ce concert de protestations automnal, les jeunes veulent aussi faire entendre leur voix ? Ne sont-ils pas aussi des citoyens français, même si une partie d’entre eux ne votera que dans quelques années ? Ne sont-ils pas concernés par le chapitre des retraites, eux qui vont bientôt entrer sur le marché du travail et constituer le fer de lance économique du pays ? Eux qu’on avait cru résignés ou indifférents aux affaires de la cité, tout juste bons à consommer béatement, quel beau démenti ils apportent à tous ceux qui misaient sur leur passivité. Cela s’appelle, ni plus ni moins, que l’éclosion de la conscience politique (et l’on sait quelles vocations elle peut déterminer). Les 15-20 ans, que l’on croyait dépolitisés, sont en train de redécouvrir la notion d’engagement chère à leurs aînés ; et cela est formateur de leurs esprits au moins autant que les cours séchés. Qu’importe, après cela, si leurs motivations sont teintées d’égoïsme ! Y a-t-il jamais eu des révoltes pures de tout intérêt individuel ? Qu’importe si on les dénigre en répétant un peu partout qu’ils sont manipulés par d’autres factions politiques ! Qui peut prétendre n’avoir jamais été manipulé, quelque soit le bord où il se situe ? Qu’importe s’ils le font sur leurs modes à eux, timides, ludiques ou excessifs ! L’important est qu’ils puissent donner à leurs protestations une forme collective, par là d’accéder à une vision plus vaste, plus généreuse de la vie en société. Encore faut-il que l’on ne brise pas cet élan républicain avec des matraques et des fusils à flash ball.

Bruno DA CAPO

18/10/2010

femme de président






Madame Carla Bruni-Sarkozy est assurément une bien agréable personne. Comme nous le montrait un récent documentaire sur France 3, elle est toujours gracieuse avec son personnel, elle aime les animaux et sait à merveille réconforter son auguste époux entre deux réunions de travail. Quand elle n’accompagne pas son mari dans des missions diplomatiques ou qu’elle ne répète pas ses chansons dans son studio d’enregistrement personnel, elle s’occupe aussi des déshérités de ce monde, enfants africains touchés par le SIDA ou SDF en bout de course dans Paris. A l’instar de la défunte princesse Diana, elle ne craint pas, elle aussi, d’aller dans les hôpitaux ou de se mêler humblement aux sauveteurs municipaux, presque méconnaissable dans leur tenue réglementaire. Bref, elle accomplit à la perfection toutes les fonctions d’une reine et l’auteur de ces lignes ne doute pas  un instant de la sincérité de ses engagements. N’est-ce pas, au fond, simplement humain que de vouloir éponger sa part de misère quand, comme elle, on a autant reçu de la vie ?
Notez bien qu’il y a quand même des questions qui lui font perdre momentanément son ravissant sourire. Par exemple lorsqu’un journaliste ose avancer qu’elle fait ainsi de la politique. Et la première dame de France de lui rétorquer avec une exquise politesse:
« De la politique, moi ? Pas du tout ! Je trouve plutôt triste votre question. Je ne fais pas ça pour me faire élire. »
Là encore, qui oserait mettre en doute sa parole ? A quelle fonction politique pourrait-elle d’ailleurs prétendre ? Conseillère municipale à Neuilly ? Adjointe au maire, Député(e) ? Aucune autre situation ne pourrait lui donner la représentativité et l’aura dont elle jouit déjà.
Et pourtant, ne lui en déplaise, c’est le journaliste impudent qui a raison. Oui, elle fait bien de la politique, indirectement, par son action associative – ce qui est quand même la première forme de participation à la vie de la cité – ,et surtout par sa médiatisation. Comment pourrait-il en être autrement ? Comment peut-on imaginer que son charisme ne serve pas un peu le prestige de son époux, surtout quand ce charisme se met au service d’activités caritatives. A sa façon, Carla Bruni-Sarkozy semble dire au monde que la beauté n’est pas un obstacle à la bonté ; que l’on peut être riche et avoir le souci des pauvres. Soit ! Mais que ce soit au moins avec la pleine conscience que ces conditions de vie dégradantes sont aussi la conséquence d’un système politique qui subordonne les valeurs humaines aux valeurs financières. Un système qui accroît les inégalités, creuse les différences avec le sentiment serein de sa légitimité. Et qui, dans notre pays, en est le meilleur représentant ?  


Erik PANIZZA